Marie-Alice Thierry Portmann, DRH chez Ayming et qui recrute une vingtaine d’alternants et stagiaires par an, donne ses conseils pour recruter les meilleurs profils.
Avant tout, je pense que l’entreprise a un rôle sociétal extrêmement important à jouer et a le devoir d’intégrer les jeunes générations dans le monde du travail. Avoir une politique d’accueil des jeunes en interne est donc extrêmement important. D’autant que l’entreprise a tout à y gagner :
1) Des aides financières de l'Etat sont intégrées au plan de relance pour favoriser le recrutement des jeunes. Elles sont cependant soumises à certaines conditions, avec notamment un nombre d’embauches d’alternants à respecter. Elles s’adressent surtout aux grandes entreprises.
2) Recruter des jeunes est un très bon moyen de créer un process de recrutement dans une entreprise qui ne l’aurait pas fait sinon. Recruter un stagiaire répond à un besoin ponctuel alors que l’alternance, qui s’inscrit dans la durée, peut entraîner un recrutement en CDI par la suite. En tous cas, il faut réellement voir le stagiaire et l’alternant comme des collaborateurs à part entière. Ils participent aux mêmes tâches qu’un CDD ou un CDI.
3) Je crois aussi beaucoup au reverse mentoring. Un senior peut mentorer un jeune et inversement. En échange des savoir-faire et compétences, le jeune va apporter une vision sur le reste du monde, la maîtrise des outils digitaux et des écosystèmes que le senior ne connait pas forcément. En plus, le jeune apporte ce regard neuf qui est si important dans les entreprises. Je crois qu’on doit toujours challenger le statu quo et les gens qui sont là depuis longtemps ont du mal à changer.
Je ne suis pas sûre qu’on recrute différemment un collaborateur, d’un stagiaire ou d’un alternant car le plus important est de recruter une personne qui corresponde à la culture de l’entreprise et qui a un bon fit avec l’équipe. Il faut donc recruter une personne avec ses motivations, son histoire, ses attentes, ses rêves, son énergie, peu importe que ce soit pour un contrat classique, une alternance ou un stage. La seule différence réside dans le niveau d'exigence des compétences de chacun. S’intéresser au candidat est la première chose à faire. Pour cela, on peut par exemple se demander : qui est ce jeune en face de moi ? Qu’est-ce qu’il a dans le ventre ? Dans la tête ? Qu’est-ce qu’il va apporter à mon entreprise ? Sera-t-il compatible avec mes équipes ? Aurais-je envie de travailler avec lui ? Est-ce que j’ai confiance en cette personne ? J'attends surtout qu’il me montre qu’il est ultra motivé par le poste et ça, ça ne s’apprend pas. Les savoir-faire, si. Quand je vois des annonces pour des stages et alternances qui demandent d’avoir déjà eu une expérience professionnelle, ça me fait hurler. Comment peut-on demander à un jeune qui débute de connaître le monde de l’entreprise ? Il faut bien commencer quelque part. On dirait que les recruteurs et managers l’oublient.
Il faut se mettre sur tous les canaux de recrutement : aller vers les écoles pour leur proposer ses offres d’emploi, s’inscrire sur jobteaser pour participer à des événements de recrutement dans les écoles et exploiter toutes les plateformes d’emploi digitales. Je conseille d’être présent sur toutes mais c’est aussi important de les choisir en fonction des profils qu’on recherche. Par exemple, si LinkedIn est une bonne plateforme, elle ne sera pas efficace pour recruter un charpentier. Il faut prendre conseil sur ces sujets quand on est sur des métiers de niche.
D’un autre côté, les jobs datings permettent de mettre en avant les atouts de son entreprise et d'attirer de meilleurs profils. Peu importe qu’on soit une grosse ou une petite entreprise. Chez Ayming, juste avant la pandémie, on a organisé une session de 4h pendant laquelle tous les candidats et les collaborateurs internes se rencontraient. On a passé un après-midi entier à discuter et créer des affinités. Ça a super bien marché ! Résultat : moins de 80 % de turn-over car on a réussi à créer un sentiment d’appartenance à l’entreprise.
En plus de tout ça, il faut bien sûr se transformer en chasseur de têtes et chercher les meilleurs candidats soi-même. Ça laisse plus de choix.
Notre politique de recrutement s’appuie sur la construction d’un pipeline de candidats qui ont la rage de vaincre ! Nous structurons le processus de sélection avec des étapes claires afin que le candidat et nos équipes impliquées sachent comment apporter le meilleur à chaque étape mais surtout éviter les sessions où le candidat répond toujours aux mêmes questions posées par des personnes différentes. Nous organisons des sessions d’entretiens communes pour pouvoir débriefer ensemble et rendre les étapes de recrutement plus simple pour les candidats. Nous les incitons à être créatifs et à nous présenter leurs idées, mais en même temps, nous évaluons leur capacité à s'affirmer et à être clair dans le partage de point de vue. C'est un moment très riche et amusant, les jeunes talents adorent ça. Nous nous appuyons sur l’attitude et le comportement pour choisir nos futurs Aymers : de l’énergie, la rage de gagner, de la simplicité et l’envie de nous rejoindre. Nous voulons une expérience positive. Sans oublier que les jeunes veulent avoir des réponses très rapidement, nous nous engageons à le faire dans un délai maximum de 48 heures après l'entretien.